Ma contribution à l’enquête publique sur la cinquième ligne de tramway

Enquête publique tramway ligne 5 Montpellier, le 9 mai 2013

 

Contribution de Christian Dupraz

Conseiller Général du canton des Matelles

Vice-Président de Hérault-Transport

 

 

 

Monsieur le président de la commission d’enquête publique

Messieurs les membres de la commission d’enquête publique,

 

Je souhaite attirer votre attention sur l’incohérence d’une partie du tracé préférentiel de la cinquième ligne de tramway proposé dans cette enquête publique. J’ai eu l’occasion d’exposer ces arguments à M. le Président de la commission lors de notre entretien du 6 mai en mairie de Saint-Jean de Védas.

 

Le tracé actuel n’est pas “d’intérêt public” sur deux tronçons.

 

Le tronc commun avec la ligne 1 entre Albert 1er et Saint-Eloi.

 

Ce tronc commun, essentiellement défendu pour des raisons d’économies dans le dossier soumis à l’enquête, affaiblit considérablement l’intérêt de la partie nord de la ligne. La variante 1 (par l’avenue du Père Soulas et la Voie Domitienne), qui est écartée avec très peu d’arguments, est en effet beaucoup plus efficace. Cette variante permet en effet de desservir des sites majeurs pour Montpellier :

 

  1. Le campus agronomique de Supagro (La Gaillarde), où travaillent 2000 personnes dont 600 étudiants (avec résidence universitaire)
  2. La résidence universitaire de la Voie Domitienne (une des plus grosses de Montpellier)
  3. La fac de pharmacie (et son musée)
  4. Ainsi que de nombreux autres établissements (Cliniques Rech et Saint-Roch, Centre de formation du personnel hospitalier, Centre Régional de Médecine du Sport, Centre Régional Information Jeunesse, CREPS, Direction Régionale Jeunesse Sports et Cohésion Sociale…)

 

Un décompte rapide montre que plus de 1000 voitures rejoignent quotidiennement le site du campus Supagro (et encore plus lors des nombreux événements organisés chaque semaine sur le campus, congrès, conférences, etc..dans l’amphithéâtre P. Lamour). Il y a aussi plus de 300 voitures garées devant la résidence universitaire de la voie domitienne, et un nombre à déterminer mais très élevé de véhicules qui fréquentent quotidiennement tous les autres sites.

 

Sur le tracé par l’avenue du Père Soulas, on trouve par ailleurs une population importante (le dossier d’enquête reconnait que le potentiel y est plus élevé que sur le tronçon commun), et surtout une clientèle nouvelle! Le dossier omet en effet de rappeler que la clientèle située sur le tronçon commun avec la ligne 1 est DEJA desservie. Il ne faut donc pas comparer le potentiel des deux tracés, mais le potentiel additionnel permis par les deux tracés : il est nul avec le tronc commun, et très important avec la variante 1. Il y a là une inexactitude majeure dans l’argumentaire qui a conduit à écarter la variante 1.

 

Le dossier d’enquête donne en effet comme principaux arguments pour le choix du tronçon commun :

  • l’allègement de la fréquentation de la ligne 1, qui est effectivement saturée sur le parcours Saint-Eloi – Comédie. Or la variante permet parfaitement cet effet, puisque les étudiants qui seront montés en amont (Paul Valéry) ne prendront plus la ligne 1, quel que soit son parcours : changer à Saint-Eloi pour la ligne 1 ne sera pas efficace, le temps d’attente étant du même ordre que le rallongement du parcours par la variante 1 (5 minutes).
  • les économies ainsi faites : nous y reviendrons plus loin, la variante 1 est d’un rapport coût-efficacité bien supérieur à certaines autres parties de la ligne. Le dossier d’enquête évoque les travaux gênants pour le quartier. Certes, mais… les avantages à moyen terme les compensent très largement, comme partout où on construit un tramway, pourquoi ici plus qu’ailleurs?. Le dossier pointe également le coût des acquisitions foncières à prévoir pour réaliser la variante 1. Or une étude détaillée du parcours montre que les acquisistions foncières seraient minimes, surtout avec la suggestion de parcours modifié qui sera évoquée un peu plus loin.

 

En adoptant la variante 1 la partie nord de la ligne 5 de tramway deviendrait vraiment la ligne des campus agronomiques, car elle relierait l’institut de botanique, Supagro, la fac de pharmacie, l’Université des sciences (et des lettres), le CNRS et Agropolis. Les collaborations entre ces différents centres représentent des milliers de déplacements chaque jour sur cet axe, aujourd’hui essentiellement faits en voiture. Nous avions suggéré que la décoration des rames de la future ligne 5 soit inspirée du végétal, pour souligner cette spécificité.

 

Par ailleurs, l’aménagement du tramway sur l’axe de la Voie Domitienne et de Sabatier d’Espeyran préfigure le futur axe de liaison transversale entre les lignes de tramway par un trambus évoqué dans toutes les réflexions sur Montpellier 2040, et qui devrait voir le jour sur cette ceinture (aujourd’hui parcouru par le bus “La Ronde”), et qui “recyclera” des morceaux des différentes lignes de tramway (par exemple ligne 2 de Aiguelongue à Charles de Gaulle, ligne 3 de Tonnelles à Pergola).

Tracés erronés de la ligne 5 dans le dossier d'enquête publique

Extrait du document d’enquête publique indiquant des tracés inexacts des parcours du secteur 4

 

J’attire par ailleurs votre attention sur les erreurs contenues dans le tracé de ce secteur dans le dossier soumis à enquête publique (rapport H, page 36). Le tracé retenu (en rose) est faux à partir de Albert 1er : il est indique sur l’avenue Bouisson Bertrand au lieu de l’Avenue Saint-Charles, et il n’est pas positionné sur l’avenue du professeur Grasset. Cette erreur graphique induit à surestimer la différence entre les deux tracés, en donnant une image plus courte et directe du tronc commun, et plus tortueuse et indirecte de la variante.

 

Pour la variante, afin d’éviter les virages serrés et contraints en bordure du stade Philippides, il serait préférable d’emprunter, à partir de l’arrêt Albert 1er, la rue du Professeur Henri Serre et la rue Auguste Broussonnet, ce qui donnerait un tracé sans virages difficiles, rapide, efficace, ne nécessitant pas d’acquisitions foncières significatives.Le surcoût prévisionnel de réalisation de cette variante est de 30 millions d’euros selon les services.

 

Le prolongement de la ligne au-delà de l’arrêt Paul Fajon vers Lavérune.

La population desservie sur ce tronçon Paul Fajon – Lavérune est notoirement insuffisante pour justifier de la construction d’une ligne de tramway, même à voie unique. On retrouve la même erreur que celle qui a conduit à réaliser le terminus de Jacou pour la ligne 2 : population insuffisante, et terminus en impasse ne permettant pas de prolongation future utile pour une évolution en réseau de tram interurbain (tram-train). L’axe de la route de Lavérune ne dessert que des zones pavillonnaires peu denses ou de vastes zones sans habitations jusqu’au village de Lavérune (seulement 2700 habitants). Tous les techniciens m’ont confirmé que cette partie du projet est une aberration économique. La ligne 5 devrait se terminer aux Bouisses, dans un secteur à fort potentiel de densification urbaine, et préserver la ceinture verte existante au-delà, jusqu’à Laverune. Une offre de bus cadencés vers les communes périphériques sera beaucoup plus pertinente, et raisonnable en termes d’usage de l’argent public.

Par ailleurs, le coût de ce tronçon est totalement disproportionné avec son intérêt. Il est estimé à 80 M€ par les services, dont la moitié pour le viaduc Paul Genevaux, qui permettra au futur COM (Contournement Ouest de montpellier, liaison à 4 voies entre les autoroutes A750 et A9) d’enjamber l’actuel giratoire. Il s’agit ici d’un financement déguisé d’une solution routière que l’on fait supporter au tramway. Le projet de COM est un projet d’Etat (continuité du réseau national entre 2 autoroutes), qui doit être financé par l’Etat.

L’économie ainsi réalisée serait de l’ordre de 80 M€, et permettrait aisément de financer la desserte des campus agronomiques évoquée ci-dessus.

En conclusion, du point de vue de l’intérêt général, il est important de valider un tracé pour la ligne 5 qui soit efficace, en desservant des populations nouvelles et suffisamment denses, et qui ne soit pas une menace pour la ceinture verte de Montpellier. C’est pourquoi je vous invite à prononcer un avis défavorable au tracé préférentiel sur ces deux tronçons.

Je reste à votre disposition pour toutes précisions qui vous paraitraient nécessaire, et vous prie d’agréer, Messieurs les commissaires-enquêteurs, l’expression de ma haute considération.

Christian Dupraz

 

 

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